vendredi 15 novembre 2013

Prévenir et réagir efficacement à la rivalité fraternelle


«Ils passent leur temps à se chicaner! On dirait qu’ils aiment ça!» «Mathieu adore faire enrager sa sœur et ça dégénère souvent par des coups et des cris!» Les conflits entre les enfants de la famille sont très fréquents, ils sont normaux et aident les enfants à tester les stratégies de résolution de conflit. Mais jusqu’où doit-on les laisser aller?
Bien qu’elles nous fassent littéralement damner, les chicanes entre nos rejetons n’ont pas que des désavantages. En effet, le milieu familial est un laboratoire unique où les enfants peuvent tester et expérimenter différentes façons de faire afin de vérifier les impacts de leurs gestes. Ce qui ne marche pas avec sa soeur a peu de chance de fonctionner avec les amis de la garderie… Il peut donc être judicieux de profiter des «occasions» suscitées par les querelles entre eux afin de leur enseigner et d’expérimenter avec eux les habiletés sociales et leurs résultats: prêter un jouet, attendre son tour, exprimer ses émotions, décoder les émotions de l’autre, etc. Les conflits peuvent aussi être un bon moment afin de rappeler nos valeurs (respect, tolérance, etc.).
La difficile cohabitation avec la fratrie leur permet aussi de développer progressivement (mais jamais assez vite) leur tolérance, leur patience, l’art de la négociation, le partage,  ou toutes ces qualités qui leur permettront de mieux vivre en société et qu’ils ne peuvent apprendre au contact des adultes puisqu’ils ne sont pas d’égal à égal.
Enfin, et c’est ce qui est le plus rassurant, leurs querelles ne signifient pas vraiment qu’ils se détestent et c’est en s’exerçant à s’affirmer devant leurs frères et soeurs qu’ils développent -l’assurance nécessaire afin de s’affirmer et de se défendre devant leurs amis, les enfants qui pourraient leur faire du mal ou encore des adultes agresseurs.
POUR PRÉVENIR LA RIVALITÉ ET LES CHICANES
Chacun sa place, chacun a le droit d’être différent!
1. Valorisez les différences. Les enfants aiment être reconnus, avoir une place bien à eux dans la famille. L’un peut être l’artiste de la famille, l’autre le sportif, etc.
2. Évitez les comparaisons entre les enfants: «Regarde ton frère, il mange toute son assiette, lui.» «Vite, habille-toi! Ta soeur a fini, elle!»
3. Évitez de les inscrire dans des activités où ils risquent de se retrouver en compétition les uns avec les autres. 
4. Évitez de prendre parti pour l’un ou l’autre des enfants ou de toujours défendre l’enfant qui a tendance à peu s’affirmer. La «victime» risquerait alors d’interpréter votre compassion comme une dose massive d’amour, alors que «l’agresseur» pourrait se sentir rejeté. Ces sentiments risqueraient bien évidemment d’empirer la situation…
5. Évitez de toujours demander au plus vieux d’être raisonnable ou responsable des plus jeunes.
6. Ne tentez pas d’être égal avec tous, c’est peine perdue. Répondez plutôt aux besoins de chacun. Si vous entendez un «ce n’est pas juste!», répondez: «Non, en effet, ce n’est pas juste! Mais c’est le mieux que je peux faire.»
7. Que chacun ait un espace et des objets personnels. Que chacun puisse être seul s’il en a envie.
Cultivez la complicité fraternelle
1. Encouragez l’entraide entre les enfants: si l’un d’entre eux se blesse, son frère peut le consoler, le plus vieux peut aider le plus jeune à apprendre le vélo, on peut faire le ménage de la chambre de Julien et ensuite celle de Justine…
2. Soulignez les bons moments qu’ils passent ensemble (sans sarcasme du genre: «pour une fois…» ou «Tient, il n’y a pas de sang! Ce n’est
pas normal!»).
3. Ayez fréquemment des discussions et des activités agréables en famille.
Acceptez que ce ne soit pas toujours le paradis…
1. Donnez-leur le droit d’être en colère. Ce n’est pas toujours agréable d’avoir des frères et soeurs, laissez-leur le droit de le dire. Écoutez-les vraiment et validez l’émotion: «Oui, c’est vrai que ton frère crie parfois très fort et que ça doit être tannant pour toi. Tu dois avoir envie de te boucher les oreilles!». Ils n’attendent pas toujours une solution de votre part, mais parfois simplement une oreille compatissante.
2. Prenez du recul. Ils n’ont pas à être toujours d’accord. Ils aiment bien se chicaner d’ailleurs. Ça passe le temps et ça met du piquant…
3. Ne récompensez pas le rapportage. Jouez la carte de l’ignorance ou encore laissez tomber un: «Ouais, je lui en parlerai plus tard.»
Mais lorsqu’ils se chicanent, qu’est-ce que je fais?
Enseignez-leur à utiliser les 1-2-3: lorsque mon frère ou ma sœur fait quelque chose qui me déplait :
1. Si je peux tolérer la situation, j’ignore ou je m’éloigne.
2. Si c’est vraiment dérangeant :
  • A. Je lui demande GENTIMENT et POLIMENT d’arrêter. S’il continue:
  • B. Je lui dis fermement d’arrêter (posture, regard et ton ferme, mais pas agressif et sans crier). S’il continue encore:
3. Je vais demander de l’aide à mon parent (le parent avertit sévèrement ou envoie en retrait selon
le cas).
N’aidez votre enfant que s’il a fait ces deux premières étapes. Sinon, retournez-le à ses «devoirs»: «Commence d’abord par lui demander gentiment.»
• Résistez à la tentation d’intervenir dès que vous les entendez se quereller. Ils risqueraient alors de prendre l’habitude de crier et d’attendre la cavalerie pour la moindre peccadille. Attendez un peu pour voir s’ils ne trouveraient pas eux-mêmes une solution. Si le ton monte dangereusement, demandez-leur de venir vous voir s’ils veulent avoir un coup de main pour trouver des solutions. S’ils doivent eux-mêmes se déplacer et laisser leurs jeux, ils seront rapidement plus motivés à trouver des solutions de façon autonome. 
• Toutefois, vous devez intervenir et être conséquent dès qu’il y a un geste de violence ou des paroles vraiment blessantes qui sont prononcées. Je vous suggère, dans ces moments, de retirer dans sa chambre celui ou ceux qui ont posé les gestes de violence, peu importe qui a commencé. Un geste réparateur et des excuses sincères peuvent être exigés. Ayez un langage clair: «C’est normal d’être en colère, tu as le droit d’être fâché et de le dire, mais jamais par la violence.» Après coup, lorsque la colère est descendue , revoyez ensemble la situation et aidez-le à trouver comment il aurait pu réagir autrement. (Ne lui dites pas comment faire, aidez-le à trouver ce qui lui ressemble.)
• Évitez de jouer à l’arbitre. Soyez médiateur: écoutez chacun jusqu’au bout, aidez-les à exprimer le fond de leur pensée et leurs émotions puis -guidez-les vers des pistes de solution, mais ne réglez rien à leur place. Si l’un des enfants refuse de collaborer, il sera retiré et aura « perdu par défaut».
• Puisqu’ils doivent progressivement bâtir leur «coffre à outils» de résolution de conflit, il est préférable de chercher des solutions telles que le tour de rôle, le partage, l’échange ou la négociation que de simplement aller vers des solutions faciles comme de les séparer ou de confisquer l’objet de leur querelle.  
• Refusez de «défendre» un enfant ou d’intervenir à sa place s’il s’estime lésé par son frère ou sa soeur. Voyez avec lui comment il peut régler le problème, quoi dire ou faire. -Accompagnez-le au besoin, mais c’est d’abord lui qui doit s’affirmer.
• Toutefois, une fois que l’enfant s’est affirmé adéquatement, ne laissez pas passer le «picossage» entre les enfants.  Si l’un d’eux s’amuse à faire fâcher l’autre, c’est un manque de respect qui mérite une conséquence.
Gardez votre sens de l’humour, ils s’aiment au fond… Ne vous êtes-vous pas querellé avec vos frères et sœurs dans votre jeunesse?

1 commentaire: